Faire écrire un album à tes élèves ? Ça donne envie, c’est motivant ! Oubliées les journées épuisantes et les soirées trop remplies ! Ça te fait vibrer. Et pourquoi tu as choisi ce métier ? Parce que justement tu le vois comme un métier-passion, avec sa dose d’adrénaline. Parce que tu as envie de proposer des activités motivantes à tes élèves et que tu veux t’éclater.
Alors tu fonces, tête baissée. Et tu te prends un mur. Et toute ta motivation si grande soit-elle ne fait pas le poids face aux difficultés rencontrées. Faisons un petit récap de ces difficultés pour voir si on parle bien de la même chose…
– Certains de tes élèves sont incapables d’écrire en autonomie
– Il y a des niveaux très hétérogènes
– C’est extrêmement chronophage, tu en es à la 12ème séance et l’introduction n’est toujours pas terminée
– Les écrits sont pauvres ou/et incohérents ou/et incompréhensibles et bourrés de fautes ou pire tout ça à la fois mais avec beaucoup d’imagination ce qui se traduit par 10 pages illisibles (et tu as la nausée au bout de 2 pages de lecture, sauf que tu as 25 autres cahiers à lire)
– Rien qu’en pensant au temps que tu vas passer à corriger tout ça, tu verdis
– Tu ne fais plus ni EPS, ni arts plastiques, ni anglais, ni vocabulaire, ni maths pour avancer dans ce projet (mais qui a eu cette idée ?????)
– Tu vois pas comment tu vas pouvoir t’en sortir et finir ce #&$@€% d’album !
Et après cette épreuve, tu te dis PLUS JAMAIS ÇA ! Rien que les mots production d’écrits te donnent des sueurs froides. C’est bien simple, tu n’en feras plus, c’est trop compliqué, tu ne veux plus jamais revivre cet épisode digne d’un film d’horreur.
Ok nous comprenons ton stress. Mais faire écrire ses élèves, c’est important.
Alors on va te donner quelques conseils, pour que la production d’écrits réintègre ton emploi du temps, sans les sueurs froides, sans développer de phobie.
Des conseils basiques, on va pas tout réinventer ni tout révolutionner. Quand on est débutant, qu’on a la tête dans le guidon et pas d’expérience, ces choses toutes simples on n’y pense pas. Pourquoi ? Ben justement c’est ça l’expérience. Quand tu t’es pris plein de murs, que tu as discuté avec des collègues, testé plein de stratégies différentes, appris par des lectures ou des formations, ces conseils basiques tu les as découverts, mais quand tu débutes, tu as trop de choses à comprendre, à découvrir, tu ne maîtrises pas tout, c’est normal.
Conseil n°1
Alors tout d’abord, ne te lance pas dans des activités trop complexes et trop ambitieuses. Attends de maîtriser un peu plus ! Rappelle-toi : tu dois faire simple.
Conseil n°2
Faire écrire ne signifie pas forcément faire des écrits longs. Il faut faire écrire ses élèves quotidiennement, en proposant des écrits courts, faciles à retravailler. Et de temps en temps un écrit un peu plus long, mais tu n’es pas obligé(e) de faire écrire un roman de 452 pages. Un petit paragraphe (selon l’âge des élèves bien sûr) suffira.
Conseil n°3
Tu peux utiliser toutes sortes de différenciation et de modalités pour aider les élèves qui ne sont pas en capacité d’écrire en autonomie. Dictée à l’adulte, phrases matrices (qui servent de modèle, l’élève fait varier quelques mots ou parties de la phrase), consigne allégée, écrit plus court, boîte à mots (pour avoir une banque de mots à disposition), écriture en binôme, en petit groupe, en collectif…avec ou sans toi…
Conseil n°4
Planifie des écrits de travail dans ta séquence. Ça c’est super important. Tu dois permettre à tes élèves d’anticiper, de se projeter, de réfléchir à ce qu’ils vont écrire. Ce travail préparatoire est indispensable et permet de limiter les difficultés. Cela peut être fait en collectif, en binôme, en individuel…C’est une première étape pour organiser sa pensée, mieux réfléchir avant de s’exprimer à l’oral. Cet écrit ne se corrige pas.
Conseil n°5
Si tu t’es lancé(e) dans un écrit long tel que l’écriture d’un album il faut limiter la casse (les heures de correction, les sueurs froides, le truc qui n’en finit plus…). Ne demande pas à chaque élève d’écrire une histoire, mais fais plutôt écrire un texte collectif, en découpant l’histoire en épisodes. Tu divises ta classe en groupes, et chaque groupe prend en charge l’écriture d’un épisode (tu trouveras le déroulé d’une séquence type en fin d’article).
Conseil n°6
Tu as le droit, si certains passages sont complexes ou moins intéressants ou tout simplement parce que c’est trop long, de prendre en charge des parties de l’histoire. On décide de ce qu’il se passe en groupe-classe à l’oral, mais tu prends ta plus belle plume et tu l’écris.
Conseils n°7
Si tu as divisé ta classe en groupes, alors le système des ateliers est vraiment pertinent. Cela dit, même si ce n’est pas un travail de groupe mais de l’écriture individuelle, prendre un petit groupe permet de sacrés avantages. Les autres sont en autonomie, sur un exercice qu’ils maîtrisent et où ta présence n’est pas nécessaire (justement pas la production d’écrits). Le petit groupe va te permettre de guider ces élèves de façon efficace (feed-back immédiat, reformulation, étayage…) et différenciée.
Conseil n°8
Tu corriges directement avec les élèves de ton petit groupe, tu fais des retours pour faire évoluer les phrases et éliminer les incohérences. Tu fais repérer les erreurs. A la fin de l’atelier, le texte de chaque élève n’est presque pas à corriger puisque tu l’as fait avec eux.
Conseil n°9
Tu laisses tomber l’orthographe tant que le dernier « jet » n’est pas écrit. C’est plein de fautes et c’est normal. Un élève ne peut pas mobiliser ses connaissances en orthographe tout en réfléchissant au sens et à la syntaxe. Tu t’occuperas du nettoyage orthographique à la fin, pendant une séance d’orthographe. D’ailleurs ne leur fait pas tout corriger, sélectionne juste un passage, cela sera moins complexe pour eux.
Conseil N°10
Tu choisis un nombre de séances et tu t’y tiens. On peut toujours tout améliorer, mais tu risques de les lasser…Alors correct, compréhensible, cohérent oui. Mais personne ne joue pour le prix Goncourt. Alors laisse tomber la perfection.
Déroulé type d’une séquence d’écriture de texte long d’après « la grande histoire » de Mireille Brigaudiot
1. En collectif, la classe se met d’accord sur l’histoire. Tu peux par exemple partir d’un album en conservant les personnages et inventer une nouvelle histoire. Les élèves choisissent les personnages, les lieux, les différents évènements, la fin de l’histoire.
2. En collectif, la classe construit l’histoire à l’oral.
3. Tu représentes l’histoire par un schéma (canevas) qui restera affiché et permettra aux élèves de se repérer dans le récit et servira de trace mémoire.
4. Tu constitues des groupes, chaque groupe rédige un épisode de l’histoire. Chaque groupe fonctionne selon son niveau (en dictée à l’adulte, en autonomie, avec de l’aide en différenciation…)
5. Tu reprends les écrits de chacun pour reformulation, correction, amélioration.
6. Après chaque épisode, tu proposes une relecture au groupe classe pour ajuster, corriger, et avoir l’épisode en tête avant d’écrire le suivant. Tu peux même faire définir par le groupe une liste de mots à utiliser pour l’épisode suivant.
Et maintenant, à toi de jouer !